La journée a été axée sur les rencontres. Ce tournoi est un vrai cosmopolitisme.

Je voulais suivre le match espagnol prometteur sur le papier BautistaAgut contre Verdasco. J’arrive vers 10h45 assez confiant pour trouver une place. Que nenni. Les tribunes à l’ombre sont bien remplies. Et vu le cagnard annoncé, il est hors de question de me mettre au soleil. Solution de repli, un match franco-nippon. Après un premier set décousu et perdu, Julien Benneteau remporte la bataille du deuxième contre Taro Daniel. Au troisième et au quatrième, rebelote. L’ancien de 36 ans a les cartes en main et son meilleur atout, l’expérience, lui permet de boucler le match en plus de 3h, face à un joueur exténué. Le spectacle dans les tribunes est au niveau de celui du terrain. Je suis encerclé de Japonais dans une ambiance très bon enfant et très feutrée. L’anglais n’étant pas le fort de mes voisins, le seul moyen de communication est le haussement d’épaules et le sourire. Après le match, j’arrive à faire marrer Benneteau avec un «t’avais les atouts contre Taro » et lui souhaite une bonne récupération. Il remercie les supporters français pour leur soutien et reste un bon quart d’heure savourer, signer des autographes et poser pour des photos. L’interview Eurosport sur le court est très chouette avec son petit garçon, qui salue son papy et sa mamie.

Procédons maintenant à un petit lexique des supporters présents en fonction des nationalités. Liste non exhaustive de comportements observés lors de ces deux premières journées, avec l’idée, loin de moi, de ne pas généraliser :

  • les Japonais font des « ohhh » avec un ton montant quand le coup est magnifique, des « ahhhh » descendants quand le coup est raté et des « héhéhé » neutres quand le Japonais remporte un jeu important. Tout est parfois rythmé par des applaudissements à haute fréquence avec les mains très rapprochées.
  • Les Espagnols crient des « vamos » et des « venga » réguliers et motivés.
  • Les Chiliens font comme les Espagnols avec 50 décibels en plus.
  • Les Australiens chantent avec un verre de bière à la main, comme leurs cousins Britanniques.
  • Les Français sont… gaulois, tutoient leurs favoris et ont souvent une intimité avec le joueur. A les écouter, ils sont tous de la famille ou le meilleur pote du tennisman. Ils aiment crier « allez les Bleus » et chanter leur hymne national.
  • Les Belges sont un peu comme les Français avec quelques pintes en plus. Leur teint est plus rougeaud.
  • Les Suisses sont confiants, sûrs de leur force. Ils n’attendent pas depuis 1983 pour gagner un grand Chelem.
  • Les Slovènes font un complexe d’infériorité. Ils encouragent leur joueur en espérant qu’il perde honorablement. Ils aimeraient s’emballer comme leurs voisins serbes ou croates.
  • Les Américains font la grimace car leurs joueurs sont aux fraises.
  • Et mes préférés, les Bosniaques. Ils ont un joueur Dzumhur, 28ème mondial, qu’ils suivent avec un attachement incroyable. Hier, il gagne après avoir été mené 2 sets à rien, avec un tie-break dans le 3ème et on a l’impression qu’ils étaient 20 sur le terrain pour lui tenir la raquette. Il paraît que l’année passée, il perd en 5 sets et tous ses supporters le suivaient en chantant dans les travées du parc après sa défaite. Il en avait les larmes aux yeux. Au prochain tour, il joue l’Australien Millman. Il y aura du spectacle dans les tribunes. Pas besoin de chanter « meunier, tu dors »

Comme le plus important est de ne pas rester sous le cagnard, je vais profiter d’un brin d’ombre pour manger et suivre l’entrainement de Marin Cilic. Belle séance déterminée, il n’est pas là pour beurrer les tartines. A sa sortie, j’espère une photo mais une centaine de personnes ont la même idée. Il ne s’arrête que pour un compatriote. Si je veux poser avec lui, va falloir apprendre le croate.

Je file ensuite sur le court numéro 8 pour suivre Gaël Monfils mais il ne reste que des places au soleil. Je me résous à aller regarder Richard Gasquet. Je ne suis certes pas fan de l’image qu’il renvoie mais je dois admettre que le regarder est un plaisir. Il a une variété de coups incroyables et un des plus beaux revers du circuit. Je regarde le match en discutant avec mes voisins, un couple de sexagénaires slovènes. Leur compatriote Kavcic ne fait pas le poids et l’issue ne fait pas doute malgré un sursaut au 3ème set. Ca mérite bien une photo avec le Français. En plus, il a la gentillesse de finir juste avant le début du match de Federer que je m’empresse d’aller voir sur le central.

1h34 hier pour Nadal, 1h39 pour le Suisse aujourd’hui. La même facilité et le même écart avec leurs adversaires. On a l’impression que la partie n’a pas vraiment débuté qu’on est déjà à son interview d’après-match avec John McEnroe. A noter que Will Ferrel, acteur américain, a ensuite également effectué une interview complètement décalée des deux anciens numéros un mondiaux. Du genre « ça me fait plaisir d’être avec 2 légendes comme Roger Federer et John MacIntosh » ou « Roger, tu préfères être un vampire ou une sorcière ? »…

Sinon j’ai commencé le match assis à ma place et préféré, comme hier, le finir un peu plus près. Ca m’a permis de croiser deux de mes voisins, 5 rangs sous ma position, les 2 entraineurs du vainqueur de 19 grands chelems, le Suisse Severin Lüthi et le Croate Ivan Ljubicic, ancien numéro 3 mondial. Il y a pire comme endroit pour suivre un bon tennis.

Je pars finir ma journée sur le court numéro 3 pour assister au dernier jeu de la 15ème défaite d’affilée de Mladenovic. C’est incroyable une telle série. J’imagine la terrible gamberge. Tu dois plus vouloir voir une raquette de ta vie. Je quitte le stade derrière ses entraineurs accompagnés de Thierry Champion, nouveau directeur du haut niveau à la FFT, et à les entendre, ils paraissent ne plus savoir quoi faire.

Pour le fun et grosse coïncidence, je rencontre 2 personnes qui ont la même veste Uniqlo Djokovic que moi: un Bulgare et un Coréen (du Sud, celui du Nord n’a pas le droit de sortir après 20h).

Je rentre en compagnie d’un couple de Suisses, qui ont le mérite de parler français. Ca me change un peu. Après les avoir quittés, je croise sur un pont, mal éclairé, Alexandr Dolgopolov, ancien numéro 13 mondial. Et je me demande après coup comment et pourquoi j’arrive à reconnaître un tennisman ukrainien dans la pénombre à 23h ????? A suivre.